Chair de poule, frissons, larmes… L’écoute ou la pratique musicale déclenche des sensations parfois inattendues… Pourtant, l’émotion ressentie prend racine dans notre cerveau. Qu’est-ce que l’émotion musicale ? Quels sont les mécanismes cérébraux impliqués dans une expérience musicale ? Autant de questions abordées par Hervé Platel, professeur en neurosciences à l’Université de Caen, invité par la Société des neurosciences à exposer lors d’une conférence ses travaux sur les liens entre arts, cerveau et vieillissement. Voici trois extraits choisis de l’interview donnée à la nouvelle république pour l’occasion.

 

Le proverbe dit que la musique adoucit les mœurs. En tant que neuropsychologue, vous affirmez qu’elle a même des effets thérapeutiques ?

« En neurologie, il existe plein d’exemples de prise en charge s’appuyant sur la musique, son écoute ou sa production. Les aspects rythmique et mélodique sont utilisés notamment pour l’orthophonie et des troubles du langage, la récupération de l’attention et de la mémoire après un AVC, pour améliorer la synchronisation des mouvements chez des patients parkinsoniens, pour faire reculer la sensation de douleur dans les unités de soins palliatifs, pour accompagner des personnes souffrant d’Alzheimer… Pour ces derniers, on a démontré que la mémoire musicale était très résistante à la maladie et que les patients pouvaient même encore apprendre de nouvelles mélodies. Et lors d’ateliers musicaux, on a constaté un éveil cognitif remarquable, avec des personnes qui se remettent à communiquer. »

 

Comment explique-t-on ces bienfaits ?

« Écouter de la musique fait fonctionner de très larges réseaux dans notre cerveau, en partant des régions auditives et en se connectant avec les régions motrices. C’est une sorte de  précâblage presque automatique et irrépressible, qui fait par exemple que lorsque l’on entend une musique très rythmée, on a envie de taper du pied et de bouger les mains. C’est ce qui explique que cela provoque un éveil moteur, une tonicité.
La musique, c’est aussi quelque chose qui provoque du plaisir, des émotions, et donc la libération de substances comme la dopamine dans le cerveau. Un phénomène que l’on retrouve par exemple dans les plaisirs alimentaires, sexuels, avec les drogues. On peut presque dire que la musique est une forme de drogue douce ! »

 

Classique ou death metal, toutes les musiques se valent-elles ?                 

« Ce qui est important, c’est de personnaliser le choix musical en fonction du goût des gens, que ce soit du jazz, de la musique du monde ou de la pop. Il y a un lien très intime entre les musiques que l’on a entendu et des moments forts de notre vie. On a même des exemples de personnes qui se sont réveillés de coma en entendant des musiques qui avaient une signification très forte pour eux. »

Retrouvez l’interview dans son intégralité ici